• L'Institut Amadéus est un think tank marocain en pleine ascension qui affiche des ambitions importantes de développement sous la direction de son dynamique président, Brahim Fassi Fihri. Je profite de la reprise par l'Institut Amadeus de mon analyse sur les sanctions contre l'Iran pour leur faire un peu de publicité. 

    Lien vers la page d'accueil de leur site (cliquer sur le logo) :

    Institut AMADEUS

     

    Voici ce qu'on peut lire sur leur site web :

    L’Institut Amadeus est un think tank marocain, indépendant, créé en 2008 et basé à Rabat. Il a été conçu dans le but d’apporter une contribution au débat public marocain et maghrébin et dans la perspective de se mouvoir en porte-voix des sujets de préoccupations des pays du sud.

    L’Institut Amadeus a une double fonction : l’analyse et la création de débats. Il se positionne aujourd’hui comme un laboratoire d’idées et un espace de débats par excellence. Il  est à la fois un centre de réflexion, de conseil, de dialogue, de proposition et de consultation mais également une plateforme d’échanges, de rencontres et de coopération Nord-Sud et  Sud-Sud.

    Il existe une synergie entre les différentes activités de l’institut, notamment entre son Centre d’Analyse et de Publications et ces événements.

    Les grandes orientations stratégiques de l’Institut se situent autour de 6 axes thématiques et géographiques :

    Les axes thématiques 

    Les axes géographiques

     


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  • (Chronique initialement publiée sur le site du monde.fr. Retrouvez l'original)

    Alors que le Conseil de Sécurité de l'ONU vient d'adopter un quatrième round de sanctions contre l'Iran – avec un vote négatif du Brésil et de la Turquie —, il convient de s'interroger non seulement sur la pertinence, mais aussi sur le caractère potentiellement dangereux de cette stratégie qui montre aujourd'hui clairement toutes ces limites.

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    Ces sanctions constituent une victoire pour la Secrétaire d'État américaine Hillary Clinton qui apparaît de plus en plus comme un faucon au sein de l'Administration Obama, avec un ensemble de prises de position tranchées (notamment sur le conflit israélo-palestinien) qui la rapprochent bien plus du « jusqu'au-boutisme » va-t-en-guerre de George W. Bush que de la logique d'apaisement et de rééquilibrage prônée par le Président Obama dans son discours du Caire ou dans son discours de réception du Prix Nobel de la Paix.

    La persévérance dans une sorte de harcèlement à basse intensité du régime iranien rappelle en effet les mois qui ont précédé l'invasion de l'Iraq en 2003 durant lesquels la stratégie du gouvernement américain a consisté à essayer de convaincre progressivement leur opinion publique et leurs alliés au sein de l'OTAN du caractère inévitable d'une intervention armée, après avoir simulé l'épuisement de tous les recours diplomatiques. Il est donc fort à parier que les États-Unis demanderont – directement ou via leurs alliés atlantistes – un renforcement des sanctions contre l'Iran avec le vote d'un cinquième voire d'un sixième paquet de sanctions, en poursuivant toujours dans la même logique aveugle, inefficace et contre-productive.

    Au-delà du caractère finalement assez dérisoire de ces nouvelles sanctions qui ont toutes les chances d'être contournées et invalidées par les autorités iraniennes et leurs opérateurs économiques et financiers (voir à ce sujet l'article de Jo Becker dans le New York times dater du 7 juin 2010), il n'est pas certain que cette victoire à la Pyrrhus soit dans les intérêts des États-Unis à moyen et long terme. Si l'objectif officiel est de stopper le programme nucléaire iranien, les États-Unis ont en réalité depuis longtemps abandonné toute illusion à ce sujet. L'objectif officieux est plutôt d'étouffer l'Iran économiquement afin de lui faire renoncer à sa volonté de puissance régionale et d'amener une éventuelle implosion du régime théocratique ainsi que le montre le soutien très intéressé des États-Unis au « printemps de Téhéran » de 2009 dont plusieurs figures importantes ont depuis lors pris leur distance avec la contestation populaire un peu trop vite assimilée à l'émergence d'une « société civile ».

    Le concept de « société civile » brandi par les médias et les analystes occidentaux s'avère lui-même trompeur du fait de son périmètre à géométrie variable et des soupçons qui pèsent sur sa manipulation par des forces politiques. Il faut faire preuve d'un degré conséquent d'irréalpolitik – selon un néologisme forgé par Hubert Védrine – pour croire qu'une évolution du régime iranien puisse se faire sous la pression de la rue, en court-circuitant les mécanismes de délibération politique qui existent au sein du système institutionnel. À titre d'analogie, et sans remonter jusqu'aux événements de Tian An Men en 1989 ou à l'essoufflement du printemps démocratique russe de 1991, il est bon de rappeler que le rêve des « révolutions de couleurs » de ces dernières années a tourné à la désillusion dans la plupart des pays qui en ont connu, de l'Ukraine à la Géorgie. Ainsi que l'exprimait avec clairvoyance feu Samuel Huntington la « société civile » ne s’avère souvent rien de plus qu'un leurre instrumentalisé par des forces politiques organisées disposant de relais médiatiques puissants.

    Ainsi, Washington n'a toujours pas renoncé à l'idéologie néo-conservatrice du changement de régime et de la démocratisation par la force même après les fiascos irakiens et afghans, et même après avoir redoré son blason avec la colombe de la paix brandie à coups de discours à tonalité wilsonienne par le Président Obama. Outre qu'elle est inefficace et dangereuse, cette stratégie qui vise à faire apparaître l'Iran comme un État voyou isolé sur la scène internationale méconnait profondément l'évolution des rapports de force internationaux intervenue au cours de la dernière décennie avec l'émergence d'une nouvelle diplomatie Sud – Sud, illustrée par l'accord Téhéran – Ankara – Brasília conclu en mai dernier.

    Cette nouvelle diplomatie vise à refonder un ordre international qui reflète l'évolution des rapports de force en pointant du doigt les structures de sécurité collective et de gouvernance mondiale qui n'ont pas évolué en soixante ans. Ainsi, la volonté de faire respecter à la lettre le Traité de non-Prolifération (TNP) nucléaire de 1968 par les États qui l'ont signé — dont l'Iran — tout en passant sous silence la prolifération nucléaire hors traité – celle de l'Inde, du Pakistan ou d'Israël – lorsqu'elle concerne des États alliés de la superpuissance américaine vide le TNP de sa portée et de son autorité morale. Sans parler des puissances nucléaires officielles – les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité – dont l'engagement de dénucléarisation contenu dans le TNP a été remisé aux calendes grecques si l'on en juge par la portée très limitée des accords de désarmement conclus entre les États-Unis et la Russie.

    Au-delà des intérêts commerciaux importants que des pays comme la Russie ou la Chine entretiennent en Iran, leur adhésion du bout des lèvres aux sanctions contre l'Iran – après en avoir édulcoré le contenu – témoigne de leur embarras de puissances à la fois ancienne et nouvelles dans l'ordre international qui se dessine. Leur position ambigüe vient de leur réticence à modifier un système dont ils bénéficient de certains points de vue – à travers leur siège permanent au Conseil de Sécurité – tout en dénonçant l'hégémonie américaine en matière économique et financière et en critiquant l'unilatéralisme des États-Unis. Il leur faudra néanmoins choisir entre un statu quo ex ante qui ne correspond plus à la réalité géopolitique et un accompagnement de l'émergence de ce monde multipolaire dans lequel ils sont assurés en tant que BRICs de jouer un rôle important.

     


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  • En écho à mon article sur l'émergence d'une nouvelle diplomatie Sud Sud j'ai été interviewé par la radio TSF Jazz à la suite de la conclusion d'un accord entre le Brésil, la Turquie et l'Iran, le lundi 17 mai dernier.

    Retrouvez l'extrait qui est passé dans le journal de TSF Jazz.

     


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  • Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, l’essayiste Alexandre Adler racontait dans un ouvrage éponyme qu’il avait “vu finir le monde ancien”. S’il est vrai que ces attentats ont révélé la vulnérabilité des Etats-Unis, symboliquement touchés au coeur de leur puissance économique et financière, remettant en cause le mythe de l’hyperpuissance qui s’est développé dans l’euphorie de l’après guerre froide, pour le reste force est de constater que le diagnostic fait par Adler - celui d’une géopolitique culturaliste fondée sur une opposition irréductibles de valeurs sur le mode “Djihad versus McWorld” - est progressivement devenu dépassé. L’islamisme radical était déjà sur le déclin à ce moment là comme l’avait bien compris l’islamologue Olivier Roy. Ceux qui ont par la suite entretenu l’illusion d’Al Qaéda comme d’un réseau parfaitement organisé capable de frapper partout et à tout moment en ont fait un épouvantail commode pour masquer le statu quo sur les véritables enjeux géopolitiques (pétrole en Irak et en Iran, eau en Cisjordanie) mais la ficelle est vite apparue trop grosse.

    Le monde ancien, celui de l’hyperpuissance américaine a bien disparu mais ce ne sont pas les méchants islamistes qui en sont venus à bout, nonobstant le caractère spectaculaire du 11 septembre 2001. L’économie américaine a d’ailleurs très bien résisté à ces attentats. Non, le vrai tournant c’est produit quelques années plus tard, le 15 septembre 2008, date de la faillite de Lehman Brothers qui elle a bien failli faire imploser tout le système économique et financier, dans des proportions sans commune mesure avec tout ce que l’on a pu voir jusque là, même pendant la Grande Dépression. La faute au Shadow Banking System, ce système financier parallèle fondé sur la titrisation qui distribue près de la moitié des financements aux entreprises et aux ménages aux Etats-Unis. On a redécouvert à cette occasion une leçon que tous les praticiens du risk management connaissent bien : plus un système est sophistiqué et plus il est vulnérable. Après le “too big too fail” connu depuis les travaux de Walter Bagehot au XIXème siècle, on a assisté à la naissance du “too connected to fail” qui est la vraie originalité - mais elle est de taille - de la crise de 2007-2008.

    La crise financière a aussi révélé la résilience des grandes économies émergentes d’Asie et d’Amérique Latine comme la Chine, l’Inde ou le Brésil. Même la Russie qui a subi la plongée des cours du pétrole à l’automne 2008 s’en est plutôt bien sortie grâce aux réserves en devises accumulées. Les BRIC sont les grands gagnants de la crise. Qui peut encore en douter ? Le dynamisme des BRIC, ces pays émergents devenus “submergents” contraste de manière éclatante avec l’essoufflement du Japon et l’absence de leadership en Europe - il y a bien des nations européennes mais pas une nation européenne - comme en témoignent les hésitations dans le traitement de la crise grecque.

    Ce qui est plus frappant encore c’est que le découplage entre les économies émergentes et les économies développées - à l’exception notable des Etats-Unis dont la capacité de rebond relatif est liée à leur statut d’économie-monde et au dynamisme des nouvelles élites latino et asiatiques (voir à ce sujet l’essai d’Alain Minc “Le monde qui vient”), ce découplage se retrouve transposé au sein même des pays développés entre les multinationales qui ont su se repositionner sur les nouveaux territoires de croissance et les populations ancrées dans leur réalité nationale. Il y a désormais une déconnexion frappante entre les résultats des entreprises du CAC 40 et les perspectives de croissance économique en France. Comme si on avait délocalisé l’économie française dans son ensemble !

    Ces deux découplages inter-nationaux et intra-nationaux montrent combien les nouvelles lignes de fracture ne sont pas tant civilisationnelles qu’économiques, ce qu’elles ont d’ailleurs toujours été dans l’Histoire. C’est toujours l’économie dominante qui impose sa civilisation et non l’inverse. Même Samuel Huntington, l’auteur du “choc des civilisations”, dont on parle beaucoup sans l’avoir réellement lu avait compris cette loi historique. Cela signifie-t-il que les occidentaux vivront moins bien ou que ce qu’on appelle la civilisation occidentale est condamnée à disparaître comme l’empire romain avait été détruit par les Barbares ? Rien n’est moins sûr. Le scénario le plus probable est plutôt celui d’une hollandisation “de l’Ouest face au Reste”, en référence à la République des Pays-Bas qui avait commencé à décliner au début du XVIIIème siècle (après le Traité d’Utrecht de 1713) face à la montée en puissance de l’Angleterre. Releguée au rang de banquier de la superpuissance émergente, la Hollande n’en a pas moins conservé le niveau de vie par habitant le plus élevé au monde pendant près d’un siècle après le début de son déclin.


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  • L’actualité montre chaque jour que les grands pays émergents aspirent à jouer un rôle plus important dans la gestion des affaires du monde.

    On en a eu une confirmation la semaine dernière avec les deux mini-sommets à “géométrie variable” entre les quatre BRIC d’une part (Brésil, Russie, Inde, Chine) et entre le Brésil, l’Afrique du Sud et l’Inde (BASI) d’autre part.

    La coalition des puissances moyennes qui se dessine autour de la Turquie et du Brésil sur la question iranienne (voir à ce sujet l’excellent article de Natalie Nougayrede dans Le Monde et l’article de Guillaume Perrier sur “les nouveaux horizons de la diplomatie turque” dans le même journal) est également représentative de cette volonté d’affirmation croissante des pays émergents sur la scène internationale.

    Comment définir les caractéristiques de cette nouvelle diplomatie Sud - Sud émergente ? Il est très difficile de se livrer à ce type d’exercice dans un monde qui évolue en permanence depuis la fin du système bipolaire avec la chute du Mur de Berlin en 1989, néanmoins on peut tenter d’esquisser à grands traits certaines de ces caractéristiques :

    1. Le refus de l’hégémonisme des grandes puissances et par extension de l’unilatéralisme américain

    Ce trait constant de la diplomatie Sud - Sud est en effet bien connu depuis la conférence de Bandung en 1955 qui donne naissance au mouvement des “non alignés”. Rappelons les 10 points de la charte de Bandung :

    1) Respect des droits humains fondamentaux en conformité avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies ;

    2) Respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de toutes les Nations ;

    3) Reconnaissance de l’égalité de toutes les races et de l’égalité de toutes les Nations, petites et grandes ;

    4) Non-intervention et non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays ;

    5) Respect du droit de chaque Nation de se défendre individuellement ou collectivement conformément à la Charte des Nations Unies ;

    6) Refus de recourir à des arrangements de défense collective destinés à servir les intérêts particuliers des grandes puissances quelles qu’elles soient ; refus par une puissance quelle qu’elle soit d’exercer une pression sur d’autres ;

    7) Abstention d’actes ou de menaces d’agression ou de l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un pays ;

    8) Règlement de tous les conflits internationaux par des moyens pacifiques, tels que négociation ou conciliation, arbitrage ou règlement devant les tribunaux, conformément à la Charte des Nations Unies ;

    9) Encouragement des intérêts mutuels et coopération ;

    10) Respect de la justice et des obligations internationales. 

    Cette charte sert par exemple de fondement moral au “Consensus de Beijing” promu par la Chine dans ses relations avec les pays du Sud, notamment à travers l’affirmation de la doctrine de la souveraineté nationale et de la non-ingérence qui remet en cause explicitement le “droit d’ingérence” d’inspiration occidentale.

    2. Le primat d’une diplomatie économique commerciale sur une diplomatie sécuritaire

    Sur le dossier iranien ce sont en effet en grande partie les intérêts économiques et financiers qui déterminent la position de pays comme la Turquie, le Brésil, la Russie ou la Chine. Les relations diplomatiques sont conçues avant tout comme un moyen de promouvoir les intérêts commerciaux.

    Des pays comme le Brésil sentent qu’ils n’ont rien à gagner d’une attitude de “soumission” sur la question iranienne. Au contraire, la démonstration d’une solidarité à l’égard d’une autre puissance moyenne aux aspirations comparables permet de renforcer le prestige du pays et son rôle d’hégemon régional.   

    3. La volonté de refonte des grandes organisations internationales pour mieux refléter les nouveaux rapports de force

    Au delà du primat de la diplomatie commerciale qui correspond plus à une démarche de prudence bismarckienne qu’à une vision irénique du monde, les pays émergents souhaitent en effet accélérer la refonte des organisations internationales au premier rang desquelles figurent l’ONU et son principal organe exécutif : le Conseil de Sécurité.

    Les pays émergents estiment avec raison que la configuration actuelle (directoire des cinq puissances victorieuses de la seconde guerre mondiale) ne correspond plus à la réalité des rapports de force économiques, démographiques et politiques dans le monde. La présence notamment de deux pays européens au sein de ce directoire (France, Royaume-Uni) et l’absence de représentant de l’Amérique Latine ou de l’Afrique est perçue comme une aberration.

    A cet égard, la position de la Chine est assez ambiguë puisqu’elle fait partie à la fois des grandes puissances reconnues par le système actuel (elle fait partie des “cinq grands”) et qu’elle se perçoit toujours comme un “challenger” ou un “outsider”. Ce sentiment est un héritage de la frustration accumulée depuis les Traités inégaux du XIXème siècle et qui va vraisemblablement perdurer au moins jusqu’à la réunification avec Taiwan. On est proche ici d’une géopolitique de l’émotion telle que décrite par Dominique Moïsi dans son essai éponyme.

    On voit bien le lien entre la réforme de la sécurité collective et le problème de la prolifération nucléaire - ou le droit à la sécurité nucléaire qui pourrait être revendiqué par des pays comme l’Iran ou le Brésil - dans un monde multipolaire. La dissuasion nucléaire est en effet efficace dans un système bipolaire - on pourrait même dire qu’elle est au coeur de cet équilibre bipolaire, c’est le fameux équilibre de la terreur - mais elle perd sa ratio essendi dans un système multipolaire.

    Avec l’émergence de cette diplomatie Sud - Sud et de “coalitions du refus” à géométrie variable, le grand problème de ce début de XXIème siècle n’est pas tant celui de la prolifération nucléaire - problème presque dépassé au regard des évolutions géostratégiques - mais plutôt celui d’une reconfiguration radicale de la sécurité collective au niveau international dans un système qui évite à la fois les dérives impériales des années récentes et les impasses d’un équilibre des puissances “façon XIXème siècle” dont on connaît le résultat. Un tel système reste encore à inventer.


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